Page:Lemoyne - Poésies - 1873.djvu/262

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Le roseau ne craint pas d’y planter sa quenouille ;
Et, n’entendant plus rien à l’entour, la grenouille
Y hasarde parfois ses râles goguenards.

Le maître de l’auberge est au seuil de sa porte,
Épiant tous les bruits qu’un souffle d’air apporte
Des grands chênes d’amont, des peupliers d’aval.
Dupe de l’espérance, il tend l’oreille… il doute
S’il ne reconnaît pas au tournant de la route
Une chaise qui roule ou le trot d’un cheval.

Rien… le jour passe…rien dans la campagne morne,
Qu’un vieux berger, là-bas, qui souffle dans sa corne,
Pour se garder des loups en maraude le soir ;
Des jurons de porchers rentrant de la glandée,
Et des cahots lointains de charrette attardée,
Aux lisières des bois cheminant sans rien voir.

Le sommeil ravivant l’espoir de sa journée,
En songe il entrevoit l’auberge illuminée,
Projetant comme un phare une riche lueur,
Éblouissant la nuit une lieue à la ronde…
En bas, la foule attend… Pour accueillir son monde,
Il saute à bas du lit, ruisselant de sueur.