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SAINT-JUST

acquis. On nous dit qu’un jour ayant rimé des vers irreligieux, il recevait cette dangereuse et alléchante prédiction : qu’il serait « un grand homme ou un grand scélérat ».

Ce qui n’est plus de la légende, bien que l’événement ne figure pas dans les biographies et qu’une main soigneuse semble avoir retranché de l’histoire le témoignage d’un dossier, est l’affaire sur laquelle nous nous étendrons parce qu’elle nous apporte et, pour ainsi dire, à elle seule, des renseignements privés de tout premier ordre sur un homme qui semblait n’avoir été mis au monde qu’aux seules fins de vie publique. Elle nous découvre un Saint-Just non plus aux prises avec les « citoyens » et les électeurs éternellement révélés par les documents relatifs à cette jeunesse, mais entouré d’amis, de voisins, d’une famille. « L’affaire Saint-Just » est un tel bonheur psychologique arrivant à la biographie du conventionnel qu’on s’écrie d’horreur au pieux vandalisme qui a souhaité sa disparition[1]. Grâce à elle la vie du révolutionnaire, auquel on ne pouvait reprocher que des antécédents un peu fades, sera d’un bout

  1. Au moment où nous constations sa disparition des Archives nationales, nous avions fait l’histoire des communications toujours très partielles ou très partiales de ce dossier.