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POÈMES ÉPARS

1848
L’histoire de la vie
(Traduit de l’anglais)

Toute petite enfant, sur le sein de sa mère,
 Je la vis qui dormait !…
Je la revis plus tard, vierge !… une plainte amère
 Sur sa lèvre expirait !
Or, je la revis femme ! Elle avait, douce chose,
 Un charmant nouveau-né !
C’était beau !… Mais son front penchait pâle et morose
 Aux larmes condamné !
Des ans se sont passés ! Quand je revins près d’elle
 Elle était à genoux,
Priant près d’une lampe à la blanche étincelle
 Sans enfant, sans époux !
Je n’ai vu que des pleurs à l’œil de cette femme,
 Si suave pourtant !
Elle était belle et sainte ! et Dieu lui prit son âme
 Oh ! Dieu, lui, l’aimait tant !
D’abord, joyeuse enfant, puis, blonde jeune fille.
 Épouse mère ; enfin,
Veuve au cœur désolé, sans amour, sans famille,
 Elle fit son chemin !
Et je l’ai rencontrée ? Et nous nous séparâmes
 Pour ne plus nous revoir !
La mort réunira nos corps ; et nos deux âmes
 Au ciel iront s’asseoir !

Montréal, 17 mai 1848.