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DUVIQUET

saluer « le Prince » et à lui faire leur Cour. Heureuses celles chez qui il daignerait descendre ou qui, du moins, auraient à loger les officiers de Royal-Artillerie, de Loyal-émigrant, de Rohan-infanterie ou de Royal-Louis ; tels étaient les noms de régiments nobles débarqués à Quiberon ; à les prononcer on sentait passer un parfum de l’ancien monde… Mais pourquoi n’avançaient-ils pas ? Le temps paraissait bien long ; de fait, les premiers racontages épuisés, on ne savait rien de ce qui se préparait dans la presqu’île conquise. Dix jours déjà sont écoulés depuis le débarquement ; les « royaux » devraient tenir Rennes et Angers, et rien ne bouge. Le 30 juin on entend enfin gronder au loin le canon ; on l’attendait avec tant d’impatience qu’on croit en percevoir le bruit jusqu’à Craon et jusqu’à Segré, — en Mayenne et en Maine-et-Loire[1] ! Fausse joie : l’armée de Puisaye n’arrive pas. Enfin, après trois interminables et angoissantes semaines d’espoirs déçus, on apprend que les troupes royales sont en marche ; elles s’avancent vers le cœur de la Bretagne et tout le pays frémit d’allégresse.

Au château de Coëtlogon, à gauche du chemin qui mène de Vannes à Rennes, par Josselin et Merdrignac, résidaient en ces jours d’anxieuse attente, madame et mademoiselle de Guernissac, correspondantes actives de l’agence secrète que les Princes entretenaient à Paris. Ces dames étaient de celles qu’exaltait l’approche des émigrés victorieux et qui convoitaient ardemment l’honneur de les recevoir.

  1. A. de Beauchamp, Mémoires secrets relatifs aux différentes missions royalistes de madame la vicomtesse Turpin de Crissé, II, 254.