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LA MIRLITANTOUILLE

embusqués et, de cette casemate improvisée, dirigeaient un feu nourri sur les Chasseurs du Roi qui gardaient le poste de la Mairie, encombré de prisonniers. Bientôt rejoints par quelques braves gardes nationaux, les gendarmes accentuèrent leur offensive et les Chouans quittèrent la place, se repliant, de rues en rues, vers le Cours. Cette résistance tardive fut le signal du départ ; par la rue des Cordeliers et la rue aux Chèvres, les détachements royalistes s’écoulaient, encadrant les prisonniers délivrés ; le jeune du Faou, posté avec ses hommes devant la caserne dont il avait bloqué les occupants durant toute la nuit, protégeait la retraite. Quand les dernières bandes furent passées, il se replia à son tour[1], formant ainsi l’arrière-garde de l’étrange cortège qui s’éloignait sur la route de Ploufragan, et que nulle troupe ne poursuivit[2].

Sans rangs, à la débandade, les Chouans détalent, fusil au dos, pêle-mêle avec les soixante chevaux de la cavalerie républicaine sur lesquels on a juché les femmes et les éclopés ; la pièce de quatre, enlevée, sans son caisson, à la Mairie, roule, avec son coffret à gargousses, sur une charrette qui lui sert

  1. C’est, sans doute, ici qu’il faut placer le fait déclaré par la femme Touanigot : — « Un chef, très jeune, qu’on appelait Dufour (Du Faou) fut à la rencontre de madame Le Frotter qui était montée sur un cheval sans selle et la fit monter sur le sien, qui avait un panneau. » Le même témoin entendit madame Le Frotter dire à plusieurs reprises : — « Où est donc mon fils, quand verrai-je mon fils ? » On lui répondit : — « Un peu de patience, madame, vous le verrez ; il reviendra. » Étienne Le Frotter, blessé au bras, était probablement à l’ambulance où il se fit panser par la citoyenne Conan, ainsi qu’on l’a dit.
  2. « Le peu de forces qu’il y avait dans la ville ne permit pas de poursuivre l’ennemi aussitôt qu’on l’eût désiré. » Proclamation de l’Administration centrale des Côtes-du-Nord. Placard imprimé. Archives nationales, BB18 253.