rer ce papier-monnaie remboursable en numéraire, à l’exclusion de tout autre, dès la restauration de la monarchie. Cette conception ruinerait indubitablement le crédit de la République et la mettrait à merci en quelques semaines. À ce titre, elle ne déplut pas ; d’irréprochables gentilshommes, susceptibles sur le point d’honneur et qui auraient individuellement mieux aimé mourir que faire tort d’un liard au plus avéré fripon, goûtèrent fort cette ruse de guerre[1]. On était, il est vrai, au printemps de 1794, la terreur faisait rage ; pas une ville où l’échafaud ne fût en permanence, et la proposition de Puisaye s’adressait à des hommes que la ruine, les deuils, la persécution réduisaient au désespoir et qui s’accoutumèrent à le considérer comme leur chef en raison même de l’audace et de la nouveauté de ses projets.
L’un des premiers qu’il s’attacha appartenait à une antique et noble famille ; c’était le chevalier de Tinteniac, romanesque et touchante figure : au début de sa carrière, brillant officier aux chevau-légers, puis de la marine royale, ardent au plaisir, il a aimé, il a joué ; de retentissants duels et de mauvaises affaires ont compromis son avenir ; sa
- ↑ Elle fut probablement inspirée à Puisaye par une proposition à peu près semblable adressée dès mars 1793 au gouvernement anglais par l’Écossais William Playfair.
Guerre de Vendée et Chouannerie, p. 48. D’après les papiers de Puisaye, explorés par Louis Blanc, ce signe distinctif était : — « pour les assignats de cinq livres, à la bande de droite, le premier azur en descendant, le plus près et au bout du mot Mort, un peu émoussé par un coup de burin, dans la partie droite, à côté du filet extérieur. Pour les assignats de cinquante livres : au filet d’en bas, en dehors, sous le troisième chiffre de la série, un point rond, etc… » Louis Blanc, Hist. de la Révolution : Chute des assignats.