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LA MIRLITANTOUILLE

Le Gris-Duval mourut peu après, à trente et un ans ; son mari lui survécut quelques mois ; le décès de Le Gris-Duval est consigné à l’état civil de la commune de Saint-Gilles du Mené, à la date du 26 mai 1803 ; l’acte eut pour témoins madame de Kerigant, belle-sœur du défunt, et Julien Collenc, fermier de Bosseny ; ni l’un ni l’autre ne consentirent à signer[1] ; et cela paraît singulier : ce qui l’est davantage, c’est que la mort de cet homme de trente-six ans, réputé pour sa force et sa vigueur, quasi célèbre, d’ailleurs, passa inaperçue : l’année suivante, le préfet du Morbihan, adressant au Grand Juge des renseignements sur les principaux chefs de la Chouannerie bretonne, signalait Le Gris-Duval comme étant encore vivant : — « À la pacification de l’an VIII, écrit-il, Legris fut destitué par Georges parce qu’il ne voulut pas rendre compte de 80.000 francs qu’il avait reçus pour la solde et l’entretien de sa division. Depuis ce temps-là, il est mal avec son parti ; ayant, d’ailleurs, gagné de l’argent, il aspire à la tranquillité et s’occupe d’affaires de commerce[2]. » Et une note précise : — « Legris est à Saint-Brieuc. » Serait-il permis de supposer que, veuf, sans enfants, le chef de Chouans, désireux de disparaître, aurait imaginé de mourir, — officiellement, — pour vivre en paix dans quelque retraite ignorée de tous ?

C’est, à peu près, ce qui advint, — bien involontairement, — à Carfort. Soumis et amnistié,

  1. P. Hémon, Le Comte du Trévou, p. 83.
  2. Archives nationales, F7 6381.