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LA NUIT DU 4 BRUMAIRE

lui : — « Adieu donc, vous qui étiez ma tendre Adélaïde… ; Adieu barbare ! » Un autre est pour Agathe Cassin, la piquante soubrette du Théâtre de Rouen, qui a charmé les loisirs de La Prévalaye ; un troisième est destiné à Ninette, l’ingénue : — « Oui, c’est moi, Adèle ; votre amant n’oubliera jamais une femme aussi courageuse, aussi ferme dans sa manière de penser et d’agir… Qu’ils sont lâches ceux qui se disent royalistes ! Adieu ! Je te quitte pour la vie[1] ! » Il n’y avait point là de quoi condamner un homme à mort, même pour plaire à Merlin ; ainsi en jugea courageusement le tribunal de Coutances[2] ; le galant conspirateur fut réintégré à l’affreuse oubliette de l’île Pelée et privé de toute communication avec les vivants. Il en profita pour devenir une fois de plus amoureux ; de l’étroit promenoir de sa prison, on entrevoyait au lointain, à travers toute la largeur de la rade, un morceau de la côte, entre les bastions de Cherbourg et le fort de Querqueville. Au moyen de la lunette d’approche dont disposait son geôlier, Cormatin parvint à découvrir qu’une des maisons du rivage était habitée par une jeune femme, d’allures distinguées. Quoique deux lieues de mer le séparassent de cette gracieuse apparition, il n’en fallait pas plus pour enflammer son cœur de quadragénaire inoccupé. De son côté, l’aimable Cherbourgeoise, — une veuve de vingt-huit ans, nommée la marquise de Feuardent, — qui, croit-on, avait déjà aperçu Cormatin[3],

  1. Archives nationales, F7 6327.
  2. Les Tribunaux répressifs de la Manche, p. É. Sarot, I, p. 382. et suiv.
  3. Probablement à l’occasion d’un de ses transfèrements, car il