Page:Lenotre - La Mirlitantouille, épisode de la Chouannerie bretonne, 1925.djvu/340

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
317
LA NUIT DU 4 BRUMAIRE

fusillé des conspirateurs moins coupables qu’elle… La pauvre Eugénie ne fut pas fusillée ; mais elle contracta dans sa prison un mal dont elle mourut.

Cormatin, transféré au fort de Ham, fut gracié en octobre 1802. Il rentra à son beau château de Saône-et-Loire qu’il avait quitté plus de dix ans auparavant ; il y retrouva sa femme, divorcée et ruinée.

D’une fortune de 45.000 livres de revenus dont disposait le ménage avant la révolution, il ne restait pas un écu ; ce qui n’empêcha pas, bien entendu, de recommencer à mener grand train. Les deux filles aînées étaient mariées, mais il fallait caser la troisième qui était d’une saisissante beauté et dont Lamartine a tracé un portrait enchanteur dans ses Nouvelles confidences. Elle épousa, en 1807, le comte de Pierreclos, lequel, deux ans plus tard, se voyait obligé, par sentence du juge de paix, de fournir à son beau-père une pension alimentaire de 830 francs. Comme ce maigre revenu ne lui suffisait pas, Cormatin obtint une petite place de 2.400 francs, à la manufacture impériale des tabacs de Lyon et dans cette situation modeste, l’ex-vice-roi de Bretagne, qui avait traité d’égal à égal avec la Convention nationale, entendu tonner les salves sur son passage et porté le laurier des triomphateurs, se révéla « par son exactitude et sa subordination », le modèle des employés. Il mourut en 1812[1], misérable, oublié, mais non, du moins, méprisé comme l’était alors Puisaye, cause initiale de tous ses malheurs. Aux gages du ministère anglais depuis son retour du Canada, le fuyard de Quiberon,

  1. Outre ses trois filles, Cormatin eut un fils, Gustave. Je ne sais s’il vécut et fit souche.