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LA MIRLITANTOUILLE

ce Boishardy, dont il a naguère obtenu la tête, soupe à présent avec les généraux de la République ; il a repris possession de son château, vendu cependant « nationalement » ; il y reçoit des royalistes avérés et devant ce scandale la justice a les bras liés ! Mais Besné guette et ne perd pas l’espoir d’une revanche contre ce contumace qui s’est insolemment soustrait à l’échafaud.

Boishardy, en effet, depuis ses entrevues avec Humbert, était rentré dans son petit manoir de Bréhand, soit qu’une entente avec l’adjudicataire de ses biens lui en eût rendu la jouissance, soit que l’acquéreur, pris de panique à la tournure des événements, eût délibérément cédé la place. Le jeune chef royaliste vivait en quotidiennes relations avec sa jolie voisine, Joséphine de Kercadio, dont la mère était gardée en surveillance à Lamballe, et qui habitait la maison de la Ville-Louët, distante d’une demi-lieue à peine du château de Boishardy. Mademoiselle de Kercadio avait à son service une fille de chambre, Marie-Anne Le Roy et un jardinier, homme de confiance, Jean Le Mée : mais elle passait la plupart de ses journées au Boishardy où l’existence était plus animée et plus distrayante que dans la solitude de la Ville-Louët. Malgré la suspension d’armes, le château de Boishardy gardait, en effet, l’animation d’un quartier général : une assez forte garnison, composée de chouans et de déserteurs, cantonnait dans les dépendances, et il était rare que le châtelain ne reçût nombreuse compagnie. D’abord il logeait habituellement chez lui ses aides de camp, de Jouette, Chabron de Solilhac, le chevalier de Chantreau de la Jouberdière et d’autres, tous jeunes,