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BOISHARDY

fierais un demi-quart d’heure par semaine à la pauvre Fifine qui croit que ça ne devrait pas trop te coûter[1].

On a tiré argument de ce tendre billet pour décider que Joséphine de Kercadio avait été la maîtresse, voire l’épouse de Boishardy. Il apparaît, au contraire, que c’est là style de très jeune fille s’épanchant avec l’exubérance de la naïveté. On peut croire que mademoiselle de Kercadio et Boishardy s’étaient fiancés ; qu’ils se traitaient préventivement, en leurs badinages amoureux, de mari et de femme, d’où cette expression qui vient sous la plume de la pauvre Fine parce qu’elle en conçoit une grande fierté. Telle était la réalité, en dépit des suppositions malveillantes et des médisances : Boishardy allait épouser son amie et le trousseau était commandé chez la veuve Saint-Marc, à Rennes. Trousseau d’une richesse et d’une élégance mal adaptées à la vie errante dans les bruyères du Mené ou les forêts du Penthièvre : — « 16 aunes de moëre de soie chinée et satinée pour robe et jupe ; — 6 aunes de pékin blanc satiné pour une seconde jupe ; » — la robe de mariage, sans doute — « 5 aunes de taffetas blanc pour jupe de dessous ; — un pierrot de batiste brodé en couleurs ; — un manchon d’ourson doré ; » et des gants de peau rose brodés ou peints, et des gants chamois, et d’autres « amadis » ; et puis encore six pots de pommade fine à odeur ; six livres de poudre parfumée ; 25 livres de poudre ordinaire… Pour Boishardy : 5 aunes de drap de Louviers de différentes teintes pour trois habits ;

  1. Émile Bernard, Un chef de Chouans dans les Côtes-du-Nord, Revue des Études historiques, 1915, p. 399.