Page:Lenotre - Robespierre et la « Mère de Dieu », 1926.djvu/20

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de mille membres : il suffisait, pour en faire partie, d’être présenté par cinq d’entre eux, et de payer une cotisation annuelle de 24 livres[1]. Le menuisier Duplay s’y fit inscrire : non point qu’il se fût jamais occupé de politique, ni qu’il eût la prétention d’éclairer de ses lumières les représentants du peuple ; mais il trouvait, à quelques pas de chez lui, outre un spectacle d’une nouveauté stimulante, l’occasion de voir et d’entendre les orateurs dont les gazettes célébraient les louanges. Il coudoyait là, en égaux, Bailly, Barnave, les Lameth, Pétion, Mirabeau, Duport, Brissot, Robespierre, sans compter le duc de Chartres et le vicomte de Noailles, fréquentations flatteuses qu’il payait, il est vrai, du pesant ennui d’interminables harangues sur les questions les plus abstruses de la tactique parlementaire.

Un soir, le dimanche 17 juillet 1791, Paris était en rumeur ; le bruit se répandait d’une terrible échauffourée qui venait de se produire au Champ de Mars, entre la garde nationale et la foule. Il y avait des morts et des blessés, et l’on accusait la Cour de ce coup de force ; même la loi martiale étant proclamée, on redoutait, pour la nuit prochaine, l’arrestation des plus fameux patriotes. La séance, aux Jacobins, fut chaude ; une cohue menaçante emplissait la rue Saint-Honoré ; des applaudissements, des sifflets, des huées accueillirent à leur sortie, vers onze heures du soir[2], les membres du club. Les troupes de La Fayette, fort

  1. Aulard, La Société des Jacobins, I, XXXII et suiv. Règlement de la Société.
  2. Aulard, Société des Jacobins, III, 30.