Page:Lenotre - Robespierre et la « Mère de Dieu », 1926.djvu/202

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lesquels figurait toute la séquelle de Robespierre, Dumas, Vilate, Coffinhal, Duplay, son cousin Laviron, les Gravier, les Garnier-Launay, l’imprimeur Nicolas, le serrurier Didiée, l’épicier Lohier, Villers, recommandé par Saint-Just, le sabotier Desboisseaux, le cafetier Chrétien, le perruquier Gamey… combien et combien d’autres qu’il a sournoisement casés dans cette usine de mort devenue par eux son domaine et sa chose[1]… La lecture terminée, dans l’écrasant silence qui pèse sur l’Assemblée consternée, une voix, une seule, s’élève : celle de Ruamps qui, résumant l’impression unanime, crie : « Si le décret passe, je me brûle la cervelle ! » Ceci donne quelque courage à d’autres : Lecointre réclame l’ajournement ; mais Robespierre déjà a quitté son fauteuil et se trouve à la tribune, exigeant la discussion « séance tenante ». Il donne des ordres : « Que la Convention siège jusqu’à neuf heures du soir, s’il le faut… » Les lâches applaudissent et Couthon commence des vingt-deux articles une seconde lecture que Robespierre coupe de quelques mots comminatoires, tranchants comme la hache du bourreau. L’horrible loi est votée, et, tout aussitôt, on met aux voix le renouvellement du Comité de salut public dont les pouvoirs sont prorogés sans opposition : la Convention s’offre en holocauste au tyran qu’elle voulait abattre.

Le tableau des jours qui suivirent a été tracé bien souvent : les chuchotements angoissés des couloirs ; la révélation consternante que la loi de sang n’était

  1. Moniteur, réimpression, XX, 695 et s.