Page:Lenotre - Robespierre et la « Mère de Dieu », 1926.djvu/217

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souffre encore des extravagances de cette femme bornée « qui a reçu de la nature toutes les dispositions nécessaires pour croire à toutes les sottises dont les vies des Catherine de Sienne et des Thérèse sont remplies ». Et l’abbé, le cœur gros d’amertume, signe laïquement citoyen Théot. On l’expédia à Bicêtre où il put méditer à loisir sur les inconvénients des parentés compromettantes[1].

Tels étaient les matériaux divers que Vadier s’apprêtait à mettre en œuvre, se gaudissant d’avance du coup de massue qu’il allait asséner à Robespierre et, par ricochet, à toutes les superstitions. Le thème, en effet, prêtait aux commentaires risibles ; un homme de talent et d’esprit l’eût développé en pittoresques tableaux ; mais Vadier n’était pas Voltaire, encore que, dans sa fatuité gasconne, il se flattât manifestement d’égaler en finesse et en légèreté de touche l’auteur de l’Essai sur les mœurs. D’ailleurs, il fallait être prudent et se garder une échappatoire dans le cas où le grand prêtre de l’Être suprême prendrait mal la plaisanterie. Résolu à lancer sa bombe le 27 prairial, Vadier, pour se ménager un bon public, avertit discrètement les camarades que ce serait gai. L’Assemblée, au jour dit, se préparait donc à rire, d’autant plus que Robespierre n’était pas là : comme il traversait, la veille, toujours sombre et l’oreille aux aguets, l’antichambre du Comité de salut public, il avait entendu Vilate disant dans un groupe : « Le Tribunal révolutionnaire s’égaiera demain à l’affaire de la Mère de Dieu. » Robespierre se tourna vers lui, l’air furieux : « Comment ?

  1. Archives nationales, F7 477527.