Page:Lenotre - Robespierre et la « Mère de Dieu », 1926.djvu/219

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Vadier parut à la tribune, et le silence s’établit aussitôt.

Rien qu’à voir la longue et sinistre figure du Vieil inquisiteur, – les sobriquets étaient de mode à la Convention, – dont on n’ignore ni les délassements galants en société de joyeux compagnons[1], ni la tendre cohabitation avec sa servante Jeanneton, on prévoit déjà qu’on ne sera pas déçu. Rien de plus désopilant qu’un amuseur à visage grave et, dès les premiers mots, le contraste entre le sérieux de l’orateur et son terrible accent gascon, ses jeux de physionomie, ses intentions parfois égrillardes, mettent en joie tous ses collègues. L’occasion de rire ne se rencontre pas souvent, et ils la saisissent avec un entrain quasi puéril. Car le rapport de Vadier ne mérite pas les bravos et les éclats de joie prolongés dont le souligne le Moniteur ; c’est un salmigondis sans plan, décousu, où tout s’entremêle comme en un kaléidoscope détraqué : le roi de Prusse, les tyrans de l’Angleterre, la Vendée, les prêtres, le génie de la Révolution, l’enfer, Danton, Necker, l’Anglais spéculant dans son comptoir sur les folies religieuses, la faction d’Orléans et la scélératesse de Pitt.

La seule drôlerie un peu marquante consiste à transformer le nom de Catherine Théot en celui de Théos, – Théos, en grec, signifie Dieu, – et à tirer de ce maquillage des développements symboliques. Qui lit aujourd’hui ce pathos dans son texte officiel n’y découvre rien d’applicable à Robespierre ; pas même une allusion au très authentique

  1. Voir Vilate, 184 et 278.