Page:Lenotre - Robespierre et la « Mère de Dieu », 1926.djvu/91

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forbans qui, pour battre monnaie, fournissaient à l’échafaud sa pâture quotidienne : désireux de récupérer ses 800.000 livres, il dressait ses dogues à la chasse aux riches, et se réservait les grosses affaires. C’est aux banquiers qu’il s’attaquait d’ordinaire : son dossier abonde en dénonciations contre les gens de finances, surtout contre ceux qu’il accuse de l’avoir ruiné[1]. Il poussera à la guillotine les trois banquiers Vandenyver ; c’est à lui que le Comité confie la lucrative mission d’apposer les scellés chez les fermiers généraux[2]. Son logement de la rue Saint-Florentin est « un bureau de dénonciations[3] », et, pour y travailler en paix, il dépêche à la guillotine tous les locataires de la maison : le pharmacien Follope, du rez-de-chaussée ; la citoyenne Buard, du premier étage ; le citoyen Letellier, dit Bultier, qui habite le second. Ils se retrouveront, le 11 floréal, sur la même charrette, avec « l’infâme ci-devant » marquise de Crussol d’Amboise, une voisine, dont les fenêtres prennent vue sur la cour de Héron. Celui-ci mange à tous les râteliers, à condition qu’ils soient bien garnis, et ses opinions ne le gênent pas ; on a dit que Robespierre l’employait, – imprudemment, – à espionner

  1. Archives nationales, F7 4743. – « Je dénonce le nommé Travaret, ancien banquier de jeu chez la reine, étalant le luxe le plus insolent, venant d’acheter une terre de 1.600.000 livres et possédant plus de 300.000 livres de rente… L’équité et le salut du peuple exigent qu’on s’assure de sa personne. 11 septembre 1793. – Je déclare que Vaudreuil, grand fauconnier du ci-devant roi, a tiré pour 5.800.000 livres de lettres de change sur Pascaut lorsqu’il jouait à la banque que tenait la reine au château de Versailles… »
  2. Archives nationales, A F7 II 289, f° 111. C’est aussi Héron qui avait été envoyé en Bretagne, à la fin d’août 1793, à la poursuite des députés girondins fugitifs. Archives nationales, A F II 46 358.
  3. Buchez et Roux, Histoire parlementaire, XXXIV, 389.