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derrière les vieux murs en ruines

des oiseaux rêvant de l’épervier ou du serpent, et le bruit cristallin d’une fontaine…

Lella Fatima Zohra m’attend, accroupie en une salle étincelant à la lumière des flambeaux. C’est une femme assez âgée, au visage grave et bon, aux gestes sobres, dont on devine, dès l’abord, la haute naissance. Pourtant elle n’a point la morgue de Mouley Hassan, et les esclaves, autour d’elle, perdent leur air de servilité craintive ; quelques-unes, même, s’adossent familières aux montants de la porte et mettent leur mot à la conversation.

La Cherifa me reçoit avec une réelle bienveillance, quoiqu’elle ne me connaisse pas encore… Et certes je suis sensible à cet accueil, car je sais les vieilles dames marocaines beaucoup plus farouches aux Nazaréens[1] que leurs époux, et souvent même hostiles.

— Sois la bienvenue chez nous, dit-elle, tu honores notre maison.

— Sur toi, la bénédiction d’Allah. C’est nous qui sommes honorés d’être reçus dans une si noble famille et une si magnifique demeure !

— Nos tapis sont indignes d’être foulés par tes pieds ; si je le pouvais, je te porterais sur mes épaules… Ô le grand jour chez nous, de vous avoir pour hôtes !

— Plus grande encore est notre réjouissance, ô Lella[2] !

  1. Nom donné aux chrétiens.
  2. Titre qui devrait être réservé aux Cherifas, mais que, par