suspendues à sa mèche d’Aïssaoui, ont disparu mystérieusement. Saïd prétend que des camarades les lui dérobèrent à l’école. Je croirais plutôt que Saïd les a vendues, ou échangées contre des gâteaux.
Mais voici bien des jours qu’il ne lui reste plus rien à monnayer, et je comprends mal comment il put acheter cette provision de beignets et de glands-doux rôtis que je viens de découvrir derrière son lit. À toutes mes questions, il répond par de nouveaux cris scandés de gémissements lamentables :
— Ô mon malheur ! ô ma petite mère… Mes os sont cassés !… Ô mon foie !… Mon cœur éclate !
— Tu es encore une fois retourné chez tes sœurs ! Ce sont elles qui t’ont donné ces beignets ?
— Ô ma mère ! Par le serment je ne les ai pas vues ! Je n’ai pas quitté la mosquée avant l’aser. Demande au lettré… Comment aurais-je été chez mes sœurs ?… Ô mon petit ventre. Qu’il me fait mal !
Saïd a toujours les accents de l’innocence. Je renonce à savoir et vais retrouver mon mari dans le salon. Kaddour l’avertit, justement, qu’un indigène attend à la porte.
— Qui est-ce ?
— Je ne le connais pas. Il dit qu’il veut te parler, à toi-même… Sur lui, pas de mal, ajoute le mokhazni pour exprimer que l’autre semble riche.