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Page:Leo - Aline-Ali.djvu/242

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calme et la douceur du foyer, accoutumé sa pensée à ces méditations, à cette concentration intérieure d’où sortent les forts, qui, seuls, d’ailleurs, les connaissent, mais qui en reçoivent une force plus grande.

Depuis quinze jours déjà ils habitaient Solalex, et aucune apparence de dégel n’avait encore eu lieu. Le temps était sec, le ciel uniforme, et le front blanc d’Argentine et les rudes contreforts des Diablerets gardaient leur attitude immuable.

Un matin, quand les deux amis ouvrirent les yeux, ils virent la chambre moins éclairée qu’à l’ordinaire ; l’étroite fenêtre ne laissait passer qu’un jour opaque, et Favre, qui venait allumer le feu, annonça qu’il y avait des nuages. Sortant aussitôt de dessous ses rideaux, enveloppé de sa robe de chambre, Ali s’approcha de la fenêtre et l’ouvrit. Les nouveaux hôtes de la montagne, acceptant l’invitation, entrèrent majestueusement et remplirent la chambre de flocons souples, épais, où le jeune homme, en souriant, plongeait ses mains comme pour les saisir, tandis que Paul riait de cet exercice, énergiquement blâmé par Favre.

« C’est la peine d’avoir un petit chalet si clos pour agir ainsi ! Maintenant qu’ils sont entrés, pensez-vous qu’ils sortiront ? Non point ; il faudra du feu pour sécher tout ça, et vous pouvez compter sur un bon rhume. »

Le bon rhume, heureusement, ne vint pas, et les deux amis eurent sous les yeux, toute la matinée, un tableau magique. C’étaient des bandes de nuées qui tour à tour passaient, diverses de forme ; quelquefois légères et déchiquetées, sorte de voiles flot-