Page:Leo - Attendre - Esperer.djvu/10

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des réflexions aussi longues, si ce n’étaient celles mêmes que fit notre héros en franchissant l’espace qui le séparait du moulin à vent, et si elles ne nous donnaient l’aperçu d’un esprit à la fois amoureux des vieilles poésies et des réalisations nouvelles, qui prenait le bon parti, mais non toujours sans regrets. Comme en achevant ce monologue il arrivait au seuil de l’habitation sise au pied de la tourelle, il entra ; mais il ne trouva personne ; il appela, mais nulle voix ne répondit ; alors, passant de là dans un champ de genêts tout proche, il contempla un moment l’admirable paysage qui s’étendait sous ses yeux, et, fatigué sans doute par la marche et par la chaleur, il s’étendit parmi les genêts, lesquels, en leur qualité de genêts bretons, avaient toute la hauteur et l’épaisseur nécessaires pour lui offrir un abri frais et ombreux.

Ceux qui, imbus des traditions classiques sur la dignité de l’homme, tiennent à élever un front noble et à regarder les cieux, et qui, affectant invariablement dans leurs promenades la position verticale, ne touchent à la terre que par les semelles de leurs souliers, ceux-là ignorent ce grand monde des petites choses qui vit, croit, s’agite, aime, combat, meurt, dans l’espace compris entre la roche vive et la crête des herbes. Seuls, les promeneurs sans façon qui se reposent volontiers sur le sein de la mère commune savent quelle activité prodigieuse, quel tumulte étourdissant contient ce que les superficiels appellent silence des champs, calme de la nature.

Point de Londres, point de Paris,