Page:Leo - Attendre - Esperer.djvu/104

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même temps l’espérance au cœur. Il allait rentrer dans le grand chemin pour le traverser, quand il lui sembla voir un plus haut, à travers la haie, un chapeau de femme dont la forme particulière lui rappela Mlle Chaussat. Mais elle ne pouvait être si loin de Savenay, et d’ailleurs il ne s’en occupa guère. Il sauta dans le chemin, le suivit quelque temps, et l’abandonna bientôt, pour prendre dans les champs un chemin d’exploitation qui traversait le plateau, en se dirigeant vers la Ravine.

Il avait à peine franchi la haie qui séparait le champ du chemin, qu’un chien, en jappant, vint se jeter dans ses jambes, suivi d’une petite fille qui était Marthe. À quelque pas se trouvait Mme de Carzet, occupée sur la lisière du blé à se composer un bouquet de feuilles, en groupant par gradation les nuances les plus fines et les plus chaudes.

Émile s’arrêta, saisi tout à la fois par la présence de Mme de Carzet et par cette pensée : — était-elle donc venue à sa rencontre ?

Cependant elle semblait ne pas le voir, et ni les jappements du petit chien ni la voix de Marthe saluant Émile d’un cri joyeux, ne lui avait fait tourner la tête. Il fallut que l’enfant vînt lui dire : « Voici notre ami. » Alors elle se retourna et tendit la main à Émile. Elle avait le teint fort animé, et sous son chapeau de paille ses yeux et ses joues éclataient comme la fleur au milieu des blés.

Émile ne trouva rien à lui dire, sinon quelques mots sur le groupement artistique des nuances de son bouquet, et ils