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Page:Leo - Grazia.djvu/177

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femme a le droit de se défendre elle-même, puisque la loi ne la protège pas.

— Comment ? La loi protége tout le monde.

— Excepté la femme abusée par de fausses promesses.

— Eh ! qu’elle exige un acte notarié !

Et le juge, content de sa plaisanterie, fit appeler un autre témoin.

Au sortir de son cabinet, j’entrai dans la salle où se tenaient les assises. Il y avait dans un compartiment, grillé, sorte de cage de fer, un homme au front bas, aux cheveux noirs et épais, au regard fauve, replié sur lui-même. Ce malheureux vivait en prison depuis trois ans, probablement par suite de cette abondance des causes criminelles dont se plaignait le juge d’instruction. Le réquisitoire m’apprit le crime :

Cet homme était pasteur ; c’est l’état de prédilection de ces populations à demi sauvages, qui possédaient autrefois la terre en commun, ou à peu près, et en attribuaient, par un roulement annuel, les deux tiers à la pâture, l’autre tiers à la culture des grains. Un tel état de choses, nuisible d’ailleurs à l’agriculture, déplaisait vivement aux propriétaires, dont les biens, tout comme ceux de la commune, étaient soumis à cette obligation. En 1820, le gouvernement piémontais, voulant généraliser la propriété individuelle, permit aux propriétaires d’enclore leurs champs de murailles. Seuls, les riches purent faire cette dépense, très-considérable, vu l’étendue des terrains, bien que ces murs soient faits de pierres sèches ; et ils en abusèrent au point que, dit La Marmora, ils allèrent jusqu’à enclore des fontaines publiques, à obstruer des routes, et enfin s’emparèrent ainsi d’une grande quantité de biens communaux. Il en résulta un grand accroissement de misère et d’oppression en Sardaigne. » (La Marmora.)

Les bergers dépouillés, obligés de louer les terrains qu’ils possédaient autrefois, nourrissent contre les propriétaires une haine invétérée, et chaque avancée de culture qui