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Page:Leo - Grazia.djvu/22

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vous savez ? Mais les de Ribas, depuis longtemps, ne regardent plus à leurs alliances et vivent tout à fait en paysans. Don Antonio travaille à la terre… pas beaucoup, il est vrai ; mais on reproche aux Sardes et aux Espagnols d’être un peu paresseux. Bah ! notre terre est fertile et nous sommes peu exigeants. Dona Francesca, la femme de don Antonio, est la fille d’un paysan, ancien syndic de Nuoro. Cependant, don Antonio est resté magnifique de goûts et généreux de caractère. Bien qu’il sache à peine signer, il a la noble ambition d’instruire ses enfants ; Grazia est allée passer deux ans à Sassari, chez une tante, pour son éducation. Il en sera de même d’Effisedda, et Quirico, lorsqu’il aura passé l’école primaire, doit être placé dans un séminaire pour y apprendre le latin ; du moins si don Antonio peut faire ce qu’il projette ; car il est pauvre.

— Pauvre, lui dis-je, mais son hospitalité est large, et sa table fort bien servie.

— Oh ! me dit Effisio en souriant, l’agneau, le pore, le fromage, ne manquent jamais chez nous, qui avons des troupeaux dans la montagne ; la venaison, pendant les deux tiers de l’année, ne manque guère non plus chez un bon chasseur ; nos vignes donnent abondamment ; on récolte le froment nécessaire à la nourriture ; mais tout cela n’est pas de la richesse.

— Pardon, lui dis-je, c’est la plus essentielle et la plus sûre, et beaucoup d’habitants des villes vous l’envieraient. Mais, et vos habits de velours ? Et vos ornements d’argent et d’or ?

— Nos habits de velours sont trop souvent des guenilles, répliqua-t-il, en me montrant les justaucorps en lambeaux de plusieurs gamins qui jouaient dans la rue ; quant aux bijoux, cela passe en héritage ; mais il est certain que les plus pauvres trouvent moyen de s’en procurer ; car cela est considéré comme nécessaire. Du reste, l’or que vous voyez à nos chemises est tout celui que nous possédons. Il n’y a guère ici de