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Page:Leo - Grazia.djvu/275

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n’en ai pas pour longtemps ; j’ai entendu cette nuit les anges m’appeler. Mes esprits se demandent où ils iront, quand je serai morte, et je leur ai déjà indiqué deux de mes bonnes amies, qui seront bien contentes de les avoir. Oui, ça doit être pour cette fois ! mais je ne regrette rien, sinon de ne pas laisser la maison entre les mains d’une bonne petite ménagère, qui serait la femme d’Effisio. C’est à Nuoro, voyez-vous, qu’il doit prendre femme et nulle part ailleurs. Les esprits me l’ont dit. Eh !!! qu’est-ce que c’est que les femmes des autres pays ?…

Elle ajoutait qu’elle s’en allait de ce monde avec confiance, et que la seule chose qui lui eût rendu la mort cruelle, c’eût été de ne point reposer son dernier regard sur Effisio. Maintenant que le cher enfant était là, elle mourrait heureuse, etc., etc.

C’est déjà une chose pénible et embarrassante d’entendre quelqu’un vous parler de sa propre mort. Il est convenu qu’on doit sembler n’y pas croire, et qu’en même temps l’on ne saurait manquer d’adresser à celui qui parle de disparaitre un éloge bien senti sur les qualités qu’il possède, et l’utilité dont il est pour la société, ou tout au moins pour les siens. Tout cela est bon pour une fois. Mais quand un mourant, ou soi-disant tel, vous parle ainsi, plusieurs jours de suite, on en vient à être las de cette scie funèbre au point d’en devenir vraiment féroce et quelque peu homicide. Certes, je ne lui voulais que beaucoup de bien, à la vieille Angela ! Pourtant, au bout d’une semaine, j’en étais arrivé à désirer qu’elle en finit à tout prix, — par la guérison, bien entendu, si c’était possible ; mais aussi, ma foi, par la mort, si elle y tenait absolument !

Et je quittais la maison, laissant Effisio aux prises avec sa vieille bonne, ou occupé de ses affaires. Je n’avais plus de livres, ayant tout expédié, naturellement, avant mon départ, au vicario de X…, avec une lettre où je m’excusais de ne pouvoir les porter moi-même. Ne sachant que faire, j’allais chez de Ribas