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Page:Leo - Grazia.djvu/308

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— Qu’avez-vous ? lui dis-je vivement, qu’y a-t-il encore ?

Elle exhalait de longs soupirs, des gémissements, et les larmes ruisselaient sur ses joues. Elle parla enfin :

— Vous venez de me dire des paroles qui me font bien du mal. Moi ! c’est moi qui l’ai perdu !…

Elle se tordait les bras ; ses ongles, se crispant sur son visage, y firent des entailles, où le sang parut. Sa tête, qu’elle agitait en tout sens, comme l’orage balance un chêne, alla heurter contre la muraille, et aussitôt, avec un cri de joie sauvage, une volupté de la douleur, elle s’y heurta de nouveau. Je lui dis :

— Si Nieddu vous voyait ainsi, vous le rendriez encore plus malheureux. Il vous aime, et si vous veniez à être malade ou à mourir, il perdrait sa dernière joie.

Raimonda jeta un long regard sur la prison, sanglota et se calma un peu.

— Si je savais seulement, dit-elle, quelle est sa fenêtre parmi toutes celles-là ? Je l’ai demandé à la sentinelle, mais elle m’a repoussée brutalement. Oh ! le savoir là, prisonnier, lui !…

Elle gémit de nouveau.

— Oui, c’est vrai ! C’est moi qui l’ai conduit là, c’est ma faute ! Je n’y avais pas pensé jusque-là. Mais c’est trop vrai !… Oui ! c’est moi !… moi, seule !… Oh ! maudite !… Quand je l’ai vu entre les mains de ces chiens infâmes, alors, oui, j’ai senti que je l’avais perdu !… Ah ! pourquoi ne me suis-je pas chargée moi-même de me venger ? Pourquoi ne l’ai-je pas aimé tout de suite, lui ! lui seul, que j’adore maintenant !… Mais je m’accuserai devant les juges ! Je dirai que c’est moi seule, et il faudra bien qu’on le laisse aller. N’est-ce pas une chose indigne que de mettre ainsi les gens en prison ? Lui qui aime tant la liberté ! Dans les bois encore, on était heureux parfois. Oh ! cette justice est une chose infâme ! Voyez les pires brigands, ce sont eux les juges. On ne