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Page:Leo - Grazia.djvu/438

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petite affaire. C’était un grand ami de mon père ; il connaît à peu près la situation ; nous avons causé intimement. Il m’a dit : Don Antonio s’est coiffé de ce Murgia à un point inimaginable. Je ne sais s’il a connaissance des soupçons qui pèsent sur celui dont il veut faire son gendre ; mais à présent il lui serait difficile de reculer. D’abord, il n’oserait peut-être pas, car Pietro de Murgia inspire de la crainte, et l’on n’affronte pas volontiers son inimitié ; puis, notre pauvre ami, qui n’a jamais d’argent et qui en désira beaucoup, a commis l’imprudence d’accepter une assez forte somme de Pietro de Murgia. C’était pour couvrir une dette, faite à l’occasion du mariage de Grazia, qui, vous le savez, ne pouvait être que magnifique. Pietro a la reconnaissance en poche. De plus, ils doivent acheter ensemble des terrains bons à mettre en vignobles, et sur lesquels don Antonio fondé l’espérance d’une nouvelle fortune. D’où vient à Pietro tout cet argent ? Toujours de l’héritage du cousin de Sassari, vous savez, celui dont personne n’a jamais entendu parler ? C’est pitié de voir cet honnête homme au pouvoir de ce bandit ! Mais quand on essaye de lui dire le moindre mot à cet égard, il s’emporte. Pietro de Murgio est amoureux de Grazia, je ne dis pas non ; mais encore il veut s’étayer et se couvrir de l’honnêteté et de l’honorabilité de don Antonio et de l’influence de cette famille, afin que la justice ne regarde pas de trop près à ses histoires d’héritage, à ses voyages et à ses acquisitions. Du reste, dans les affaires qu’ils font ensemble, Pietro ne perdra rien, et don Antonio y laissera plutôt du sien ; mais il croit tout le contraire et ne sera désabusé que trop tard.

— J’ignorais tout cela, ajouta Effisio, et cependant, connaissant l’entêtement de mon oncle, je doutais qu’il pût se laisser éclairer. Maintenant, crois-tu que ce soit possible ?

André Léo.

(À suivre.)