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Page:Leo - Grazia.djvu/447

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mées d’un incarnat plus qu’ordinaire, j’en suis bien contente ! J’aurais voulu que tu füsses venu plus tôt. N’entres-tu pas chez nous ?

— Il est de bonne heure ; je saluerai ton père plus tard, lui répondis-je avec réserve.

— Mais non, viens tout de suite, nous sommes tous levés.

À mon second refus, elle comprit sans doute ; car elle rentra, et peu après, je vis de Ribas venir à moi. Il me donna la main et m’engagea à venir prendre le café chez lui ; mais avec un peu d’embarras, que je remarquai, sans pouvoir démêler si c’était gêne ou froideur. Je penchai pour la première supposition, en voyant Pietro de Murgia, planté à la porte de la chambre, qu’il dépassait en hauteur, et nous regardant d’un air de surveillance hautaine. Il demeurait donc en effet avec eux ; il était là comme un membre de la famille, ou plutôt il en semblait le maitre. Je me demandai si la tentative faite, à mon instigation, par don Antonio, pour secouer le joug de cet homme ne l’avait point appesanti ? si, pris d’un côté par la crainte, de l’autre par des engagements pécuniaires, le père de Grazia n’avait point perdu toute liberté de réagir contre la volonté de Murgia. D’autre part, malgré la promesse qu’il m’avait faite de ne point nommer à Pietro son accusateur, don Antonio n’était pas assez fic, surtout en face du rusé Pietro, pour que celui-ci ne m’eut pas deviné. Et je crus voir la haine couler pour ainsi dire des paupières de ce grand diable, en ce moment abaissées à la manière des félins ; ainsi que de son faux sourire, tandis qu’il nous contemplait. Afin de ne pas le saluer, je fis semblant de ne pas le voir, et continuai de causer avec de Ribas, qui me promena dans l’enceinte du pèlerinage.

Il y avait peu de chose à voir : en tout, une dizaine de chambres, si l’on peut donner ce nom aux toits bas, sans étage, et sans lumière, où s’entassaient les fidèles, et dont il fallait bien, au risque des regards indiscrets, ouvrir la porte, pour y voir et pour respirer.