Page:Leo - Jacques Galeron.djvu/92

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Quant à moi, par moments j’ai envie de me faire soldat. Ah ! si j’avais su !…

— Et Suzanne ? observai-je en souriant.

— Eh ! voilà ! je sais bien, allez ! Ce sont toujours les intérêts qui tiennent les hommes, et cette chère fille, c’est plus que mon intérêt ; elle est, je crois, mon âme tout entière. Mais c’est aussi pourquoi j’hésite, madame Vaillant, à la mettre dans cette galère, où elle souffrira comme moi. Si je pouvais obtenir une place aux chemins de fer, ou ailleurs…

— Vous oubliez la conscription, Jacques.

— Oui, c’est notre boulet. Je vous le dis, de vrais forçats ! Savez-vous que, sans cette clause, il pourrait y avoir une désertion générale, et que c’est bien avisé ?

Je m’efforçai de relever son courage par un mauvais moyen, généralement employé, qui est d’atténuer le mal. Il souffrait trop pour que cela pût le convaincre, et, s’impatientant, il alla me chercher plusieurs petits livres de lecture et un manuscrit.