Page:Leo - L Ideal au village.pdf/163

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suis maire. J’ai des talents d’administrateur que tout le monde reconnaît ; je puis, sans me flatter, me rendre cette justice d’avoir fait de bonnes choses à Loubans. Je ne suis donc pas le premier venu, et j’ai assurément le droit d’occuper une fonction qui m’est pour ainsi dire légitimement acquise. On n’est pas seulement père… on est citoyen !

— Je vois que vous avez raison, mon oncle ; mais, après tout, je crois qu’Agathe n’a pas si grand tort. Elle n’est pas encore mariée et peut trouver son avenir compromis.

— On me l’a bien demandée, répondit M. Darbault, mais avec l’étude ; or, tu comprends que, ayant ces deux garçons sur les bras, je ne puis pas prendre ma retraite. Toutes mes économies sont parties, ajouta-t-il en baissant la voix, et je vais être obligé, pour Marius, d’hypothéquer mon petit domaine. Je vaudrais bien, je t’assure, pouvoir donner à Agathe les cinquante ou soixante francs qu’il lui faut ; mais je suis à court trop complétement, et vraiment celui qui voudrait m’aider me rendrait un grand service, car je suis bien embarrassé et bien malheureux.

— Je puis vous prêter cinq cents francs, mon oncle, dit Lucien.

— Ah ! mon cher garçon, je n’osais pas te le demander ; car enfin tu m’as dit que vous-mêmes n’étiez pas riches ; mais tu me rends un service que je n’oublierai jamais. Je vais te donner une reconnaissance de cette somme, et tu peux être sûr qu’elle te sera remboursée. Tu me sauves la vie ! Toutes ces commandes qu’il a fallu faire, un dîner somptueux,