Page:Leo - L Ideal au village.pdf/96

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faisant de la tête un geste qui disait : « impossible ! » Ils n’avaient pas voulu révéler le but de leur visite, et, déclinant leur qualité de parents de M. Darbault, tout en mettant une pièce d’argent dans la main de la fermière, ils l’avaient priée de leur montrer le château.

Cette femme avait consenti, mais se tenait là, près d’eux, et les observait avec cette curiosité soupçonneuse qu’éprouve toujours le paysan vis-à-vis de l’étranger. Lucien attira sa sœur vers la fenêtre et lui dit tout bas :

« Si nous ne trouvons pas mieux ?

— N’y a-t-il pas d’autre pays que Loubans ? répliqua-t-elle en le regardant.

Il rougit :

« Sans doute ; mais puisque nous sommes ici…

— Ah ! Lucien ! » lui dit-elle d’un ton de doux reproche.

Il l’interrompit en montrant le paysage :

Au-dessus des bâtiments de la ferme, par une trouée des bois, la vue s’étendait sur un horizon de sept à huit lieues, tout bleuâtre aux derniers plans, et qu’animaient à l’entour les troupeaux épars dans les pâturages, les fermes, les champs traversés par la voie ferrée, où l’on voyait, en ce moment, s’allonger en courant un blanc panache de fumée, aux ondes sans cesse renaissantes qui s’épandaient et s’évanouissaient dans l’atmosphère. Plus près encore, les bois qui garnissaient les coteaux rougissaient sous le soleil, et, dans le vallon de l’Ysette, marqué par une ligne d’un vert éclatant, se balançaient au vent les têtes alignées des peupliers.