Page:Leo - L Institutrice.djvu/1

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Feuilleton de la République française
du 26 décembre 1871

(1)

LES FILLES PAUVRES

L’INSTITUTRICE


Une charrette couverte de toile, attelée de deux percherons, cheminait sur la route du département de l’Oise, au-delà de Beauvais. Le jour baissait ; au couchant, de larges bandes rouges allaient se décolorant, d’insensibles teintes grises tombaient dans l’air bleu, qu’elles envahissaient. Les collines s’estompaient à l’horizon ; toutes les cimes : arbres, maisons, côteaux, s’affaissaient lentement ; les arêtes s’adoucissaient, les lignes devenaient flottantes et molles ; déjà le chant des oiseaux avait cessé, et l’on n’entendait plus, de loin en loin, que le mugissement de quelque vache rentrant à l’étable. Les pommiers, dépouillés de fruits et penchés, qui bordaient la route, semblaient s’étirer alanguis.

Un peu en arrière du conducteur qui présidait l’attelage, armé de son fouet, deux femmes étaient assises à l’avant de la char-