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Page:Leo - L Institutrice.djvu/149

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cueilli, çà et là, plus d’un geste insolent, plus d’un signe moqueur, trop peu accentué toutefois pour qu’il fût absolument nécessaire d’en tenir compte, assez pour porter au cœur de la maîtresse leur blessure. Enfin, le calme apparent se fit ; mais Sidonie, déjà douloureusement impressionnée, y sentait sourdre l’esprit de révolte. La lecture à voix haute des grandes commença, lecture traînante, nasillarde et toute pleine de mauvais desseins, de maximes de sagesse, pourtant fort chrétiennes. De temps en temps, l’institutrice reprenait, donnait le ton, après quoi l’élève immédiatement reprenait sa note particulière, sans la moindre amélioration. Le poêle ronflait, l’atmosphère de la classe, un instant renouvelée, reprenait peu à peu sa lourdeur, se remplissant, outre les haleines, des émanations tièdes et nauséabondes du sol, sur lequel étaient posés sans intermédiaire les carreaux de brique humides ; les cartes de géographie, muettes ou parlantes, étalaient leurs carrés mornes et leurs pâles couleurs sur les murailles sales, où des taches jaunâtres et des crevasses ébauchaient des figures fantastiques, et des caractères mystérieux ; un pâle soleil entrait obliquement dans la classe au travers des vitres et formait des ronds lumineux que ça et là quelque fillette, en regardant l’estrade du coin de l’œil, s’amusait à saisir de la main ; peu à peu Sidonie cessa d’écouter le nasillement de la lectrice, et retomba dans ses tristes pensées. Arriveraient-elles donc là-bas, à dompter, comme elles disaient, cette enfant ? Serait-ce par les terreurs de l’enfer, où par l’amour de ce Dieu qui demande pour encens l’immolation de