Page:Leo - L Institutrice.djvu/213

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mal d’hommes, un peu partout, mais surtout beaucoup de Français, et la pension de 20, 000 fr. de la veuve d’un grand dignitaire.

40 francs par an, cela faisait 10 centimes par jour, plus un dixième de centime. Il est vrai que si la veuve du grand dignitaire n’avait pu faire d’économies suffisantes sur un revenu de 100, 000 francs, l’institutrice, à moins d’imprévoyance coupable, avait dû prélever, sur ses appointements annuels de 4 à 500 fr., un petit capital pour sa vieillesse.

Il faut l’avouer, Sidonie avait eu cette imprévoyance. Aussi se voyait-elle condamnée, après trente années d’enseignement, à mourir de faim, à moins qu’elle ne vécut d’aumônes. Elle ne pouvait continuer son état, comme institutrice libre ; l’école, qui maintenant allait être tenue par des sœurs, suffisait amplement aux besoins de ce village. Que faire ? De la couture ? le village avait sa couturière, et puis les yeux de la pauvre institutrice n’y voyaient guère plus. Elle ne pouvait que tricoter des bas, ce qui lui fatiguait beaucoup la poitrine et augmentait sa toux, mais lui permettait de gagner à peu près dix autres centimes par jour, pourvu qu’elle eût suffisamment de commandes.

Et le logement ? Si petite que fut la chambre, dans ce misérable village, on ne la pouvait payer moins de 35 francs par an. Sidonie vendit un de ses matelas pour payer cette chambre. Mais, quand elle n’aurait plus de matelas ?

La malheureuse en était arrivée à la lie de son calice. Il lui fallut recevoir, de la pitié de ses anciennes élèves, de petits cadeaux en nature : un fromage, une livre de