Page:Leo - L Institutrice.djvu/46

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entrant dans sa chambre, alla se mettre devant son miroir… Arrivée toute sérieuse, bientôt un joli sourire vint éclairer son visage. C’était étrange, mais en vérité ce négligé, tout laid qu’il fût, lui allait très bien. On eût dit que ces mèches de cheveux s’étaient arrangées… Le hasard est-il une bonne fée ? ou bien y a-t-il de vieux et jeunes hasards ? Elle perdit toute inquiétude, s’habilla en fredonnant et fut pendant toute la classe d’humeur indulgente.

Ce n’était d’ailleurs qu’un incident, seulement dans ces vies dormantes le moindre incident va jusqu’au fond. Le jeune Moreau tint parole ; il envoya un journalier raisonnable et consciencieux, mais celui-ci ne pouvait commencer la besogne que la semaine suivante, d’ici-là, Sidonie, en s’y donnant chaque soir et chaque matin, eut levé son carré.

— C’était toujours cela, se disait-elle, en jetant sur son ouvrage un long regard satisfait. Cela fait, avec quelle joie elle traça les sillons, où elle enfouit les quartiers de pommes de terre avec leur germe violacé, puis, au bas du carré, bordant la haie, quelques rangs de petits pois ; déjà elle les voyait couvrir le terrain de leur feuillage d’un vert tendre, parsemé de fleurs blanches, où tranchaient çà et là quelques fleurs rougeâtres, et s’affaissant sous le poids des gousses pleines. Après que le journalier eut levé tout le terrain, ce fut Sidonie elle-même qui, mal aidée par sa mère, sema, planta, fit toute la besogne, longue et dure assurément pour des membres si peu habitués à ce travail. Le jeudi, la matinée, le dimanche étaient de bons jours, qui avançaient bien l’ouvrage. Brisée de fatigue, au bout