Page:Leo - L Institutrice.djvu/58

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pure méchanceté ; car s’il arrivait qu’on leur contât quelque histoire un peu vivante, toutes ces oreilles se tendaient, tous ces yeux devenaient fixes, attentifs. Si triste que ce soit à dire, les aventures du chien Caillou les intéressaient infiniment plus que les actes des apôtres.

Mais, encore une fois, était-ce la faute de Sidonie ? Et M. le curé devait-il s’en étonner, lui qui prêchait que la nature humaine était mauvaise et ne pouvait rien que par la grâce ? Elles n’avaient pas la grâce, assurément, ces petites échappées, rudes et folles, vrais garçons, qui, par leur insouci résolu des convenances, faisaient le désespoir et le scandale de Mme Jacquillat. Ce n’était que plus tard, après leur sortie de l’école, vers quinze ans, qu’elles commençaient à baisser les yeux, à composer leur démarche, à prendre des airs doux et posés et à lisser les bandeaux de leurs cheveux ; mais alors était-ce bien la grâce du Seigneur ?

M. le curé était injuste ; Mme Jacquillat le déclarait sans hésiter. Sidonie ne s’occupait pas, il est vrai, du soin de l’église, de la parure de l’autel, et des aubes et des surplis, comme avait fait sa devancière. Mais celle-ci était une personne d’un certain âge, et Mme Jacquillat avait tout de suite été d’avis que sa fille ne pouvait fréquenter ainsi le presbytère. C’est pourquoi elle s’était elle-même exclusivement chargée de cette besogne, et, pour M, le curé, ce devait être la même chose évidemment. Il est encore vrai qu’on ne brodait point de nappes d’autel dans la classe, Mais on avait tant à faire d’ailleurs !

L’été se passa comme s’écoulent les jours