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Page:Leo - Les Deux Filles de monsieur Plichon.djvu/110

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adore, et c’est pourquoi de votre part tout lui est sensible.

Clotilde a parfois le raisonnement très-faux ; je ne pus m’empêcher de l’interrompre pour lui dire qu’il n’était nullement question de mes sentiments dans tout ceci ; mais seulement d’un goût de Blanche, auquel celle-ci accordait peut-être trop d’empire.

— Que voulez vous ? répondit la tante, c’est bien naturel ; à dix-huit ans, toute jeune fille qui se marie rêve le monde et ses plaisirs. Et puis, s’appeler comtesse de Montsalvan est bien quelque chose ; mais nos fougères n’y feraient pas grande attention. Vous comptez, j’imagine, présenter Blanche à votre famille et l’introduire dans votre monde ?

— Il y a des années que je l’ai quitté, murmurai-je.

— Quel étrange homme vous êtes ! s’écria Clotilde. Du reste, mon ami, vous avez bien raison. Tout cet éclat, toute cette grandeur, ne sont que de fausses joies ; il n’y a de vraies que celles du cœur (elle fit un grand soupir), quand elles ne sont pas pour vous la source des plus vifs chagrins.

C’était la dixième occasion qu’elle me donnait de lui demander une confidence. Nous étions seuls, et je m’étais bien promis de m’acquitter de ce devoir ; mais, à ce moment, tout meurtri dans l’âme, je ne songeai qu’à la quitter.

Eh bien, oui, tout cela me blesse, me déconcerte, me désespère. Le dégoût me reprend de ce monde-ci, et j’éprouve l’envie de m’en aller, comme, on s’en va d’une compagnie où l’on n’est pas à sa place. Après cela, je