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Page:Leo - Les Deux Filles de monsieur Plichon.djvu/146

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la petite Madeluche. Il avait vu la révolution, et me parla de l’année de la grande peur, où la France fut parcourue par un ennemi invisible. Mais ce qu’il avait le plus à cœur, c’était de m’interroger ; car sachant que j’étais de Paris, il me supposait plein de toute la connaissance qui fût au monde et il me fit les questions les plus naïves. Son imagination dépasse les conquêtes de la science ; car il me demanda si ce n’était pas vrai que de Paris on pouvait aller dans la lune et en revenir. Il écouta avidement les explications que je lui donnai, et de question en question nous aurions fait le tour du monde si je n’eusse pris congé de lui. Alors il me retint quelque temps encore en me montrant un petit livre crasseux qu’il avait dans sa poche, et qui était un livre de magie. Il avait essayé, me dit-il sérieusement, de faire les expériences dont il était parlé dans ce petit livre ; mais il n’avait jamais pu ni faire tomber de la pluie, ni voiler la lune d’un nuage, ni même faire danser les chèvres. Quant à faire venir le diable, il n’avait pas osé. Il connaissait pourtant tels et tels qui jetaient des sorts ; mais pour lui il ne voulait pas faire de mal au monde, et n’était bon que pour guérir.

— Ah ! vous guérissez, lui dis-je.

— Pas toujours. Monsieur, je ne veux pas dire de menteries. Quelquefois ça réussit ; quelquefois non.

— Absolument comme les autres médecins, répliquai-je, et quels moyens employez-vous ?

Il hésita un peu, puis il me dit :

— Le principal, c’est de prier de tout mon cœur.

— Et vous croyez guérir ainsi, quelquefois ?