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Page:Leo - Les Deux Filles de monsieur Plichon.djvu/156

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mais il n’est pas prouvé que ce passage, si court souvent, soit en lui-même une souffrance. Après tout, je le répète, cela ne distinguerait guère ce que nous appelons la mort de ce qui s’appelle la vie. Non, ce qui vous épouvante, c’est la nuit, le Tartare, empire des ombres, l’abîme, les lieux inférieurs de l’Écriture, le sépulcre béant des chrétiens, tout cet appareil lugubre dont l’ignorance et la superstition ont entouré la mort. Mais si elle n’était que l’accomplissement de cette loi, dont l’instinct vous porte à revêtir joyeusement des parures nouvelles, et qui force la terre à se couvrir de fleurs comme à dépouiller ses feuilles, vous la contempleriez avec le même sourire que provoque sur vos lèvres la vue d’un berceau d’enfant ou d’un nid d’oiseau. La mort, toutes les analogies, toutes les lois de l’univers le prouvent, n’est qu’une transformation. Est-elle une renaissance telle que nous la désirons, c’est-à-dire individuelle ? Ici, les preuves manquent encore ; mais, quels que soient d’ailleurs ses autres résultats, je la bénis, la mort, la plus féconde des lois universelles, grâce à laquelle nous avons l’amour.

— Comment cela ? demanda Blanche. Vous nous dites toujours des choses extraordinaires, William ; moi, je ne sais que ma mythologie : l’amour est fils de Vénus et non de la mort.

— L’amour enfant, Blanche, celui qui vit de jeux et de ris ; mais le grand amour, celui qui unit les êtres d’un nœud forgé par Dieu même, d’où naissent des êtres nouveaux ; l’amour sans lequel l’humanité ne serait qu’une agglomération d’égoïsmes, ou qu’un cercle