Page:Leo - Les Deux Filles de monsieur Plichon.djvu/205

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Oh ! qui me la donnera celle qui demanderait à la vie, avant tout, l’unique certitude, l’amour ? L’être fier et indépendant, actif et chercheur, qui veut prolonger sa voie, non se tapir comme les autres dans quelque niche moelleuse, seul but qu’ils ont tous en vérité…

Je cherche encore ! je n’aime donc plus ?

… Rêves menteurs !… quel être fini pourrait suffire à une aspiration infinie ? L’enthousiasme a-t-il d’autre objet que la perfection ? L’amour est donc nécessairement une illusion, et doit se dissiper quand vient la connaissance.

Quelle horrible logique ! Ainsi j’arrive à nier l’amour !…

… Et cependant le mariage est la loi générale, qui s’impose par sa propre force, et que l’homme suit toujours, tout en la blasphémant.

… Se quitter après s’être aimé ! D’où vient l’horreur et le déchirement de cette pensée ? Pourquoi le souvenir seul de ces tortures me fait-il souffrir encore ? Pourquoi le sentiment d’un sacrilège se mêle-t-il à cette douleur ?

Hélas ! quand nous demandons à l’amour de charmer toute notre vie, nous lui demandons sans doute plus qu’il ne peut donner. L’amour est la fleur de notre jeunesse, azurée, délicate et frêle comme cette fleur du lin, qui tombe dès qu’elle est touchée. L’amour est notre printemps, vieille comparaison, mais juste ; et que nous servirait de vouloir empêcher le printemps de finir ? Il est d’ailleurs d’autres amours qui nous sauvent et nous consolent, moins enivrants, mais plus purs peut-être, puisqu’ils sont plus désintéressés…