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Page:Leo - Les Deux Filles de monsieur Plichon.djvu/22

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de la fortune ? Envoie-moi leur nom et leur adresse, et Delage prendra des renseignements, si tu me permets de lui parler de cette affaire. Mais peut-être n’est-ce qu’une fantaisie, comme semble l’indiquer la fin de ta lettre, où je retrouve la trace de cette ancienne douleur que tu te devrais à toi-même, cher William, de n’avoir pas gardée si longtemps. Comment un homme aussi distingué que toi et d’un cœur si délicat peut-il encore, au bout de cinq ans, accorder à une Hermance le pouvoir de le faire souffrir ?



CINQUIÈME LETTRE.

WILLIAM À GILBERT.


15 juillet.

Il est bien décidé que je passerai ma vie à t’envoyer sans cesse à tous les diables. Voilà vingt-sept ans que j’explique et que tu ne comprends pas. Que viens-tu me parler d’Hermance et supposer que je la regrette ? Regrette-t-on le poison qu’on a vomi, parce que le désordre qu’il a porté dans notre organisme cause encore de temps en temps quelque douleur ! Elle fut la cause de mon mal, c’est vrai ; mais ma mère le fut aussi en me donnant l’existence. M’as-tu vu chercher à la revoir, après la preuve de sa trahison ? Moi, aimer un être sans âme ! Et qu’en ferais-je ? Auprès d’une courtisane ai-je éprouvé jamais autre chose que du dégoût ? au risque de vous paraître ridicule, à vous qui vous faites une mode de les aimer. Mais je croyais ; et cette pauvre créature m’a donné le doute. Je rêvais, et elle m’a fait voir.