présenta à son père en le priant de boire. Je le vis très-touché de cette attention, et Blanche, qui a le monopole des câlineries et des petits soins, s’étant élancée pour ôter la tasse des mains de sa sœur, M. Plichon lui dit un peu brusquement :
— Reste donc tranquille, toi, tu n’y pensais pas.
Maman regarde Édith avec une joie de mère et je ne sais quel instinct la porte à me regarder aussitôt après. Mais ce qui me touche le plus, en me faisant mal pourtant, ce sont les prévenances d’Édith pour sa sœur. Il y a quelques heures, elle l’encourageait à sortir par ce beau temps froid.
— Je t’assure, disait-elle, que cela te ferait du bien.
— Mais je ne suis pas malade, répondait Blanche d’un petit ton sec.
— Tu serais plus forte. L’hiver t’a déjà pâlie.
— Oh ! je ne tiens pas à être rouge comme une paysanne.
— Tu n’as pas ce danger à craindre. Tu ne gagnerais que plus de souplesse et de grâce à courir un peu. Rien n’énerve comme l’atmosphère d’une chambre chauffée.
— Les femmes n’ont pas besoin d’être fortes, répliqua Blanche en se laissant aller mollement dans un fauteuil.
— Mais si, dit Édith, elles en ont besoin, et ne serait-ce que pour leurs enfants…
— Oh ! ma chère ! Et, par un geste d’Anglaise, Blanche ramena ses mains effilées sur son visage.
Moi, je les contemplais toutes les deux. Édith surprit mon regard ; une rougeur passa sur ses traits ; elle serra son châle sur sa poitrine et dit en partant :
— C’est votre faute, William, vous qui aimez la nature