Page:Leo - Les Deux Filles de monsieur Plichon.djvu/57

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— Quoi ! ce n’était que cela ! Mettre en balance les nobles instincts du cœur et les vils soucis de l’existence matérielle ! Est-ce d’argent que l’âme se nourrit ? etc.

Une demi-douzaine d’autres phrases pareilles. Puis elle dit que Blanche aurait une belle dot et serait heureuse de réparer à mon égard les injustices de la fortune.

— Il n’y a pas d’injustice, Mademoiselle, je suis ruiné.

— Par grandeur d’âme, s’écria-t-elle, j’en suis sûre. Noble jeune homme !

— Je ne pus retenir un mouvement d’impatience.

— Oh ! mademoiselle, ne m’écrasez pas ainsi, je vous en conjure. Je me suis ruiné surtout par manque d’ordre et de jugement, par insouciance, par prodigalité plus que par bonté. Voici la première fois que je regrette cette folle conduite. Mais veuillez ne pas me prendre pour un héros. Je serais trop confus d’une telle méprise.

Cette réplique déconcerta pourtant un peu son enthousiasme.

— Au moins, reprit-elle, je suis certaine que vous n’avez donné dans aucun entraînement vil. Votre désintéressement et votre délicatesse m’en sont la preuve.

— Vous voyez bien que vous les approuvez.

— Non ! c’est-à-dire, je les honore ; mais je ne les accepte pas.

— Ils sont faux ou vrais ; il n’y a pas de milieu.

— Ils sont faux. Monsieur, je n’hésite pas, ce n’est pas un vil métal qui peut régler l’union de deux cœurs.

— Cependant, repris-je, impatienté de nouveau par le vil métal, si je cédais, rien ne me garantirait contre les soupçons.