Page:Leo - Les Deux Filles de monsieur Plichon.djvu/74

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femme, n’ayant pas le temps de songer aux autres. Mais quand vous aurez une place, serait-ce une place de 8 ou 10,000 francs, comme vous en obtiendrez sans doute par vos relations dans le grand monde, avec une famille à entretenir, vous ne seriez pas encore tout à fait un Crésus ; êtes-vous bien sûr de ne plus vouloir faire le grand seigneur ? On dit que les prodigues ne se corrigent point.

— Je souris sans répondre.

— Hein ? eh bien ? vous ne savez pas ?

— Je crois savoir, lui dis-je ; mais je répugne à donner ma parole quand on a quelque droit de n’y pas croire.

— Ma foi, je suis très-porté à avoir confiance en vous, je vous assure. Vos manières sont pleines de loyauté, d’une grandeur qui me plaît. Moi, ce ne sont pas les nobles que je déteste ; ce sont leurs préjugés. Vous n’en avez pas, c’est bien ; aussi je vous verrais avec plaisir entrer dans ma famille. Mais enfin à côté de l’homme, il y a le père, et le père doit être cent fois défiant.

— Mariez votre fille sous le régime dotal ; non-seulement je le demande, mais j’y tiens essentiellement.

— Vrai, s’écria-t-il avec un profond étonnement, cela vous conviendrait ? Votre parole d’honneur.

Je lui en donnai ma parole d’honneur. Il ne pouvait revenir de sa surprise.

— Cela ne vous blesse pas ? car enfin l’homme, le chef de famille, l’autorité…

— Et pourquoi voulez-vous, Monsieur, que je prétende à l’autorité sur ce qui ne m’appartient pas ? Ne puis-je m’entendre avec ma femme à cet égard comme