Page:Leo - Les Deux Filles de monsieur Plichon.djvu/89

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énergiquement à pareille mésalliance et que, tout en m’approuvant de ne pas avoir de préjugés, mon futur beau-père garde les siens avec amour. Le jour de notre arrivée, comme nous grimpions au pas la côte du Malignon, nous vîmes un grand garçon, vêtu d’une blouse grise, disparaître derrière les arbres, après nous avoir salués rapidement. Blanche détourna la tête avec une moue de dédain, et M. et madame Plichon ainsi que tante Clotilde échangèrent un sourire assez narquois.

— Il paraît qu’il a voulu s’assurer de notre retour, dit Clotilde. Pauvre garçon !

Quel est son malheur ? demandai-je.

On sembla vouloir piquer ma curiosité en se faisant prier un peu, et l’on me signala enfin M. Prosper comme un soupirant malheureux de ma jolie fiancée.

— Ce n’est pas qu’il ait osé me faire une demande formelle dit M. Plichon ; mais ses intentions sont assez claires et il n’eût fallu qu’un mot d’encouragement…

Je dis alors :

— C’est un naturel timide ?

— Ah ! par exemple ! s’écria Blanche, au contraire ; je ne le trouve que trop audacieux, et cela va jusqu’à l’impertinence.

Je m’étonnais de la vivacité de ces paroles et de l’accent dont elles étaient dites, quand madame Plichon ajouta :

— Mais c’est un jeune homme rempli de moyens et d’un très-bon caractère. Tout son malheur est d’être fils d’un meunier.

Je ne pus m’empêcher de sourire en regardant Blanche.