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Page:Leo - Marie - la Lorraine.djvu/63

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maître Chazelles eût appris que sa fille continuait d’aimer un gars qu’il avait chassé de la maison, et qu’elle l’allait trouver tous les dimanches au bois de la Zouche, il en serait entré dans une terrible colère, et — ce à quoi Marie songeait plus encore — cela fui eût fait un grand chagrin. Elle savait aussi qu’on ne se gêne pas pour mai penser des filles qui agissent ainsi, et qu’il ne faut espérer de cacher longtemps ces choses à la campagne, où tout le monde s’occupe les uns des autres. Ces pensées la faisaient souffrir, et plus d’une fois elle dit à Louis qu’ils devaient cesser de se rencontrer. Mais ils s’aimaient tant ! et ils avaient tant besoin de se voir qu’ils formèrent bien la résolution, mais n’eurent pas le courage de l’exécuter. Chaque dimanche, ils se séparaient en disant :

— Eh bien ! seulement encore une fois ! la dernière ! — Mais après cette dernière, une autre dernière venait toujours.

Au mois de juin eurent lieu les noces de Justin, moins gaies qu’elles n’eussent été une meilleure année. Pourtant, ce fat une joie pour les Chazelles, et surtout d’y voir Jacques, l’aîné des fils, qui, n’ayant plus qu’un an de service à faire, était renvoyé dans ses foyers. Le père ne manqua point, à cette occasion, de louer l’empereur, qui, selon sa promesse, donnait la paix à la France. Quant à la prospérité, ça viendrait plus tard ; on ne pouvait raisonnablement s’en prendre à lui de la sécheresse.

Maîtresse Chazelles ne pouvait se lasser de revoir son Jacques, pour lequel elle avait si souvent pleuré en cachette quand elle entendit parler de guerre ou qu’elle avait rêvé d’os de mort ou de cheval noir. Avec la femme de Justin, cela fit deux enfants de plus dans la mai-