Page:Leo - Un mariage scandaleux.djvu/230

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de lui offrir, Mlle Bertin entra dans le fouillis à la suite de Michel.

Que le cheval portât gendarme ou meunier, il passa, et le bruit de ses pas se perdit bientôt dans l’éloignement. Oui ! mais la petite Francille n’était-elle pas encore là ? Cependant Lucie voulait sortir de sa cachette. Elle y était entrée sans préoccupation, car à la campagne, où le décorum n’existe pas, les pensées n’en ont que plus d’innocence. Mais, depuis qu’elle y était, un malaise vague l’avait saisie. La niche de verdure était étroite, et pour ne pas écarter les branches, étant deux, il fallait se tenir bien près l’un de l’autre. Elle se tourna vers Michel, mais il ne la regardait pas et se tenait immobile sans parler. Avant de le quitter, cependant, il fallait que Lucie lui communiquât une bonne idée : c’était, en escaladant la claire-voie, de se cacher jusqu’au soir dans le jardin même de M. Bourdon, ou les massifs ne manquaient pas, et où Michel, quoi qu’il advînt, ne serait point trahi par le jardinier.

— Michel ? dit-elle.

Il se pencha vers elle pour écouter, répondit par un signe affirmatif, et ce fut tout. Alors elle voulut partir, et avança la tête, au dehors en écartant avec précaution les branches qui gênaient le passage. Mais aussitôt elle se rejeta vivement dans la cachette, car à travers la clairevoie elle venait d’apercevoir, presqu’en face d’elle, dans le jardin, M. et Mme Bourdon, qui entraient en ce moment dans le berceau de rosiers et de clématites auquel la clairevoie servait comme de fenêtre. Des yeux et du doigt posé sur ses lèvres, Lucie intima le silence à son compagnon. Il parut surpris et inquiet ; mais la voix de M. Bourdon, qui se fit entendre aussitôt, lui expliqua la nature du danger.

— Eh bien, voyons cette lettre, disait-il. Et pourquoi ne me l’as-tu pas remise de suite ?