Page:Leo - Un mariage scandaleux.djvu/479

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leurs, elle s’était affaissée peu à peu, lentement, sans rien dire… Et la voilà morte ! mon enfant, ma petite Clarisse ! elle qui aimait tant la vie, qui voulait tant être heureuse… elle est morte de misère, près de moi, là, dans les tortures, sans que je l’aie sauvée ? Elle a souffert ! bien souffert ! — Et la pauvre mère qui s’était soulevée, retomba roide sur le plancher.

Quand Mme Bertin reprit connaissance, elle se trouva sur son lit, dans l’alcôve. Son mari sanglotait dans un coin ; la bonne petite Gène, debout en face, la contemplait en pleurant ; et Lucie, brisée, était étendue sur le pied du lit, les cheveux épars ; et comme elle sentait aux tempes quelque chose de frais qui lui faisait un bien extrême, elle regarda : c’était Michel qui, en exprimant un linge mouillé de vinaigre, la soulageait ainsi. Tout ce qui maintenant leur restait d’amis était là, hors Gustave. Leur famille les avait abandonnés et trahis. Qu’était en ce moment pour eux le reste des hommes ? Sous l’empire d’une douleur profonde, la vanité n’existe plus.

— Lucie, dit Mme Bertin, j’accomplirai les derniers vœux de ta sœur mourante. Il faut que tu sois heureuse. Michel est un noble cœur.

— Maman ! oh ! ma chère maman ! s’écria Lucie.

Michel se prosternant devant Mme Bertin :

— Est-ce que c’est vrai ? Est-ce possible ? Qu’avez-vous dit ? Ah ! si c’est vrai, je vous aimerai plus que ma mère !

En même temps, Gène poussait une grande exclamation, et M. Bertin s’écria :

— Que veux-tu dire, ma femme ? Le chagrin te rend folle, tu as le délire. Michel ! va-t’en.

— À votre volonté, monsieur, répondit le jeune homme avec douceur ; et il partait, quand Gène l’arrêtant :

— Monsieur Bertin, dit-elle avec énergie, ce n’est pas