Page:Leo - Un mariage scandaleux.djvu/54

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cueillir le gui dont il était plein, et les petites filles s’en faisaient des parures de perles, et Michel cueillait pour Lucie les plus hautes touffes et les plus belles, tandis que Chérie… Oh ! les beaux jours, tout pleins de poésie et d’ignorance du sort ! Un gémissement lui échappa, et ses larmes recommencèrent.

Tout à coup, Lucie crut entendre des pas qui montaient le sentier au-dessous d’elle. Elle écouta. Les pas se rapprochaient. Quelque journalier attardé, pensa-t-elle, qui regagne le village en prenant au plus court.

Elle se mit alors à marcher doucement du côté de la maison ; mais elle fut bientôt rejointe par l’homme qui montait, et qui, malgré l’obscurité, la salua d’un joyeux : Bonsoir, mademoiselle Lucie ! Elle, sous l’ombre du chapeau, dans la nuit, ne put distinguer les traits de son interlocuteur ; mais il lui sembla reconnaître la voix, et, quoique hésitant un peu, entraînée par une soudaine réminiscence, elle dit :

— Quoi ! c’est vous, Michel ?

— Oui, mam’zelle Lucie. Vous saviez donc que j’étais de retour au pays.

— Non, il y a longtemps que je n’ai rencontré la mère Françoise. Mais, Michel, est-ce que vous restez maintenant à Chavagny ?

— Oui, mam’zelle Lucie, je suis loué chez Mourillon, mais je reviens les soirs chez nous, parce qu’à la ferme ils sont un peu gênés pour les lits. Je suis content de vous avoir rencontrée, mam’zelle Lucie ; je regardais bien toujours de vot’ côté en passant, mais c’est trop tard le soir et trop tôt le matin.

— Il fallait venir nous voir le dimanche, Michel.

— Oh ! je n’ai pas osé. Il y a si longtemps que nous nous sommes vus, mam’zelle Lucie ! Savais-je seulement si vous vous souveniez de moi.