Page:Leo - Une vieille fille.pdf/133

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

se révoltait d’avoir à passer pour dédaignée par des hommes que j’eusse méprisés. Vous ne savez pas, cher Albert, ce que certains regards et certains sourires peuvent avoir de pénible pour une femme qui a la conscience de sa dignité. Je me retirai du monde. Je m’occupai de l’instruction de Pauline, et je pris de plus en plus goût à la retraite, à mesure que la vie des autres se déroulait devant moi. Ma sœur aînée se maria fort mal. Mon frère absorba, pour faire son chemin, toutes les ressources de la famille. À la mort de nos parents, nous eûmes chacun environ douze mille francs, capital bien insuffisant. J’obtins pour ma part cette petite maison que j’aimais. Pauline préféra demeurer chez mon frère, qui s’est marié richement et qui voit le monde.

« Moi, depuis longtemps, je désirais rompre entièrement avec la position fausse et équivoque d’une femme jeune encore et célibataire. Obligée par ma pauvreté de partager ma demeure avec un étranger, peu à peu je me fis vieille à plai-