Page:Leon Silbermann - Souvenirs de campagne, 1910.djvu/120

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Ce petit engagement coûta à l'ennemi deux morts, deux blessés et deux prisonniers.

Un aumônier, venant de l'arrière, nous fit un tableau fort triste de toutes les ambulances qu'il avait visitées sur sa route. D'après lui, le nombre des morts s'élevait journellement à trente ou quarante hommes, et les trois quarts des malades avaient moins figure d'hommes que de squelettes. Le 200e régiment souffrait beaucoup plus que les autres corps. Le 12 juin, un ordre du général nous communiqua la mort du colonel Gillon, de ce régiment, et en même temps une dépêche ministérielle ainsi conçue : « Félicitations pour troupes et pour dévouement à supporter fatigues ; armée et pays entier leur souhaitent bon courage. »

Pendant le séjour à Suberbieville l'avant-garde fut occupée à des travaux pénibles de terrassement, pour la construction d'une route qui devait s'arrêter à Andriba et qui était absolument indispensable ; il n'aurait pas été possible autrement d'assurer le ravitaillement et les évacuations qui ne cessaient d'augmenter, ni d'organiser la colonne légère qui devait être constituée à Andriba pour marcher avec rapidité sur Tananarive avant la saison des pluies. La construction de cette route a soulevé de nombreuses critiques que j'ai entendu faire à mon retour en France ; mais, quoi qu'il en soit au point de vue technique, le personnel chargé de la direction des étapes et de l'organisation des convois a été vraiment au-dessus de tout éloge. Il était constamment exposé au soleil, sous un climat meurtrier. Seuls, les conducteurs kabyles n'étaient pas à la hauteur de leur tâche, et il en résulta de plus grandes fatigues pour les Européens. Mais quelqu'un surtout a le droit d'être fier de l'impulsion qu'il a donnée à cette vaste organisation ; j'ai nommé le colonel Bailloud, directeur des étapes, aujourd'hui commandant du 19e corps d'armée. Je ne sais si je réussirai à donner aux lecteurs n'ayant pas fait campagne une idée approximative de l'organisation du service des